C’est la première fois que Guterres invoque l’article 99 depuis le début de son mandat en 2017. L’article 99, qui est une procédure très rare, est un appel à l'attention du Conseil de sécurité sur «toute question qui, à son avis, pourrait menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales», selon les principes des Nations unies.
Le Secrétaire général de l'ONU a mis en garde contre un "effondrement total de l'ordre public bientôt" à Gaza, pilonnée par Israël, dans une lettre inédite au Conseil de sécurité pour justifier l’invocation de l’article 99.
"La situation se détériore rapidement et aboutit à une catastrophe aux implications potentiellement irréversibles pour les Palestiniens dans leur ensemble ainsi que pour la paix et la sécurité dans la région. Ce résultat doit être évité à tout prix", a écrit Guterres l’ONU dans la lettre exhortant l'institution chargée d'assurer la sécurité internationale à intervenir pour éviter une catastrophe humanitaire à travers un cessez-le-feu qui facilite l'acheminement de l'aide et protège la population civile.
Que signifie l’invocation de l’article 99 ?
L'ONU est composée de deux organes principaux : l'Assemblée générale, représentant tous les États membres sans pouvoir contraignant, et le Conseil de sécurité, organe décisionnel dont les résolutions sont théoriquement obligatoires. Si l'article 99 n'accorde au Secrétaire général aucun pouvoir, l'objectif est de faire pression pour une résolution exigeant un cessez-le-feu, espérant que les membres ne recourent pas au veto. En effet, les 5 membres permanents du Conseil (États-Unis, Royaume-Uni, France, Chine et Russie) ont le droit de veto sur toute résolution. Ainsi, les États-Unis en ont usé pour bloquer les initiatives de trêve entre Israël et le Hamas.
Guterres ciblé par les Israéliens
"Le mandat de Guterres est un danger pour la paix mondiale", a rétorqué sur X (ex-Twitter) le chef de la diplomatie israélienne Eli Cohen, estimant que l'activation de l'article 99 et l'appel à un cessez-le-feu "constituent un soutien à l'organisation terroriste Hamas".
Au début du mois de décembre, Guterres a exprimé ses profonds regrets face à la reprise des hostilités israéliennes dans la bande de Gaza, et l'espoir de voir la trêve humanitaire, qui avait pris fin le 1ᵉʳ décembre dernier, renouvelée entre Israël et les factions de la résistance palestinienne.
Il a été la cible de graves attaques, à plusieurs reprises, de la part des officiels israéliens, suite à ses déclarations concernant la guerre contre Gaza, et en particulier de la part de l'ambassadeur de Tel Aviv à l'ONU, Gilad Erdan, qui l'a qualifié de personne ayant "perdu son sens moral", après les propos de Guterres à l'ONU dans lesquels il a déclaré que Gaza était désormais un "cimetière" pour les enfants.
Déjà utilisé trois fois
L’article 99 a été utilisé seulement trois fois, par le passé. En 1960, Dag Hammarskjöld, alors à la tête de l’organisation, y a eu recours pour demander une réunion d'urgence du Conseil de sécurité face à la crise au Congo. Cette démarche a incité le Conseil à réagir rapidement, autorisant le déploiement d'une opération militaire de l'ONU en soutien au gouvernement congolais, dès le lendemain.
L’article a également été invoqué officiellement lors de la crise des otages américains en Iran en 1979 et pendant l’escalade de la violence au Liban en 1989. Mais aucune de ces deux occurrences n'a conduit le Conseil de sécurité à autoriser une intervention militaire.