Fin de la grève au JDD: des dizaines de journalistes s’apprêtent à quitter la rédaction
La rédaction du JDD (Journal du Dimanche), a annoncé, mardi, la fin du mouvement de grève qui touchait l’hebdomadaire depuis 40 jours pour protester contre la nomination à sa direction du journaliste d’extrême-droite, Geoffroy Lejeune.
Fin de la grève au JDD: des dizaines de journalistes s’apprêtent à quitter la rédaction / Photo: AFP (AFP)

Dans un communiqué de presse qu’Anadolu a consulté, les grévistes assurent que "des dizaines de journalistes refusent de travailler avec lui et devraient quitter le JDD", après avoir échoué à "faire échec à l’intronisation de G. Lejeune".

"Malgré l'unité et la détermination de la rédaction, malgré une lettre de soutien signée par plus de 650 personnalités de tous bords, malgré de nombreuses tribunes, malgré les alertes du comité de groupe et du comité d'entreprise européen de Lagardère, malgré plusieurs rassemblements, le dépôt de plusieurs propositions de loi au Parlement, malgré l'annonce par le président de la République de la tenue des états généraux du droit à l'information à partir de septembre, malgré le sacrifice financier de 100 journalistes et de leurs familles, notre PDG, Arnaud Lagardère, est resté sourd à nos revendications", déplorent les grévistes.

Ils assurent, par ailleurs, être désormais confrontés à "un dilemme douloureux : partir ou rester". Ils annoncent néanmoins la naissance "d'une association qui verra le jour dans les prochaines semaines" avec pour mission "de défendre auprès des pouvoirs publics la nécessité d'une évolution du cadre législatif encadrant la presse, afin de garantir l'indépendance des rédactions et la protection des journalistes dans l'exercice de leur métier".

Pour rappel, le groupe Lagardère, qui détient le JDD, avait confirmé le 23 juin l’arrivée de Geoffroy Lejeune, proche d’Eric Zemmour, à la tête du journal, malgré une grève reconductible, déjà entamée par sa rédaction.

Dans un communiqué de presse mettant fin aux rumeurs et incertitudes, le groupe assurait que le journaliste d’extrême-droite disposait d’une "connaissance acérée des attentes du public en termes d'information à l'heure des réseaux sociaux".

"Au JDD, Geoffroy (Lejeune) aura la mission d'incarner l'excellence journalistique, à savoir : les faits, l'investigation, le devoir d'informer", poursuivait le groupe Lagardère dont le patron Arnaud Lagardère estimait que "Geoffroy (Lejeune) est un talent brut du journalisme français".

Sur les réseaux sociaux, l’intéressé avait fait état de son "immense honneur" et promettait de "mettre toute (son) énergie à la réussite de ce défi".

Le communiqué, officialisant la nouvelle, a été publié alors que la rédaction du JDD venait tout juste d’annoncer une première reconduction de son mouvement de grève voté à 96%, et faisait part de ses inquiétudes, en rappelant l’orientation idéologique et politique de Geoffroy Lejeune.

"Geoffroy Lejeune, ancien directeur de la rédaction de l'hebdomadaire d'extrême droite Valeurs actuelles, exprime des idées à l'opposé des valeurs que porte le JDD depuis soixante-quinze ans. Il en va de même de Charlotte d'Ornellas, figure de la droite réactionnaire et proche des idées d'Éric Zemmour, dont l'arrivée est pressentie également", écrivaient les grévistes.

Ils soulignaient à cet effet que "sous la direction de Geoffroy Lejeune, Valeurs actuelles a propagé des attaques haineuses et de fausses informations" et que "c’est encore sous sa responsabilité qu'a été publié un article ayant valu à son auteur et au directeur de la publication une condamnation pour injure publique à caractère raciste envers Danièle Obono".

Craignant que le JDD ne glisse sur la même pente sous son impulsion, ses salariés ont notamment rappelé qu’il s’agit d’un "journal qui aime la politique sans prendre parti, attaché à son indépendance, reconnu pour son sérieux et sa modération".

"Cette arrivée pourrait mettre en péril le journal, en repoussant les lecteurs comme les annonceurs", redoutent les salariés en grève, estimant par ailleurs qu’une "semaine après la validation sous conditions de l'OPA de Vivendi, groupe contrôlé par Vincent Bolloré, sur Lagardère, cette nomination semble démontrer encore à quel point Vincent Bolloré tient déjà les rênes du journal".

Le communiqué rappelait à ce propos "que la Commission européenne enquête en ce moment même sur des soupçons de prise de contrôle anticipée de Lagardère par le groupe Vivendi, en infraction aux règles de l'UE".

AA