Pendant qu’en Turquie et en Syrie les bilans humains ne cessent de s’alourdir après les multiples tremblements de terre qui ont touché la région, le journal satirique français Charlie Hebdo a une nouvelle fois fait preuve d’inhumanité.
Le journal a ainsi publié sur son compte twitter le “dessin du jour” illustrant des décombres intitulées “séisme en Turquie” et légendées “même pas besoin de chars”. Se moquant ainsi avec mépris des images de désolation qui nous parviennent de Turquie et de Syrie.
Le journal, coutumier des polémiques, a une nouvelle fois suscité une vague d’indignation sur la toile, alors que de multiples témoignages de familles endeuillées, de victimes décédées sous les décombres et de chaos ont ému les réseaux sociaux depuis vingt-quatre heures.
Sur twitter, des internautes choqués dénoncent le mépris pour les vies humaines induit par la publication de ce dessin. Plusieurs internautes en France et en Turquie s’insurgent à travers le mot clé #MeprisableCharlieHebdo
Politologue et chercheur à l'Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (IREMAM) et directeur de recherche au CNRS, François Burgat s’indigne sur Twitter: "La honte : "Toujours plus bas, toujours plus vil"
Ce dessin n’est pas sans rappeler celui publié en 2016 lors du séisme en Italie, qui avait scandalisé les italiens. Alors que le pays était meurtri, ce même journal avait publié un dessin abject, comparant les décombres ensanglantées à des lasagnes italiennes. La ville italienne d'Amatrice, victime d'un tremblement de terre meurtrier (295 victimes) le 25 août 2016, avait alors décidé d’attaquer Charlie Hebdo pour "injure publique" et "diffamation" en Italie et en France.
Mais la plainte avait été jugée irrecevable en France. Les deux caricatures publiées par l'hebdomadaire satirique avaient été jugées par les autorités italiennes comme attentatoires à l'image des victimes et des Italiens en général. "Ces dessins sont répugnants", avait estimé le ministre de la justice italien, Andrea Orlando. La dessinatrice de Charlie Hebdo Coco avait répondu quelques jours plus tard avec un dessin montrant une femme écrasée sous les décombres lançant aux Italiens : "C’est pas Charlie Hebdo qui construit vos maisons, c’est la mafia."
Pour Mario Cicchetti, l’avocat de la ville d’Amatrice, il s’agissait alors d’un "outrage macabre, insensé et inconcevable". Interrogé à l’époque par le journal italien La Repubblica, il avait estimé que "la critique est un droit inaliénable en Italie et en France, mais tout ne peut pas relever de la satire. Dans le cas présent, ces deux dessins offensent la mémoire de toutes les victimes du tremblement de terre et portent atteinte aux gens qui sont survécu et à la ville d’Amatrice".
En Turquie, ce n’est pas la première fois que Charlie Hebdo choque l’opinion publique. En 2020 le journal satirique avait publié en Une une caricature scandaleuse du président turc Recep Tayyip Erdogan qui avait été condamnée avec "la plus grande fermeté".
La présidence turque avait qualifié ce dessin "d’abjecte" et reflétant une "hostilité contre les turcs et l’islam". "Je n’ai pas regardé cette caricature (…). Il est inutile de dire quoi que ce soit au sujet de ces vauriens", avait-il alors ajouté lors d’un discours à Ankara. "Ma colère n’est pas due à l’attaque ignoble contre ma personne, mais aux insultes contre le prophète" avait-il ajouté.