Un an après avoir pris le pouvoir au Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré est confronté à la survie de son régime. Les rumeurs de coup d’État qui rythment le quotidien des Burkinabè depuis juillet se sont finalement confirmées. Le gouvernement dit avoir déjoué un putsch dans la nuit de mardi à mercredi dernier.
Aux dernières nouvelles, quatre officiers soupçonnés d’avoir fomenté le coup d’État, le 27 septembre contre le capitaine Ibrahim Traoré sont aux arrêts à Ouagadougou, tandis que deux autres sont en fuite.
Les militaires interpellés dirigeaient des unités d’élite de l’armée. D’après les informations de Jeune Afrique, il s’agit du commandant Abdoul Aziz Aouoba, commandant des opérations spéciales (COS), le lieutenant-colonel Boubakar Keita, directeur de l’Institut Supérieur d’Études de protection civile (ISEPC), le lieutenant-colonel Cheikh Hamza Ouattara, commandant de la légion spéciale de la gendarmerie nationale et le capitaine Christophe Maiga, commandant adjoint de l’unité spéciale d’intervention de la gendarmerie (USIG).
Pourtant, à sa prise du pouvoir par un coup de force le 30 septembre 2022, le capitaine Traoré assurait les burkinabè que le règlement de "quelques petits problèmes logistiques" et de "considération" au sein de l'armée permettrait de reprendre la main sur la lutte contre le terrorisme.
Selon l'ONG Acled qui répertorie les victimes de conflits dans le monde, les attaques ont tué plus de 17.000 personnes depuis 2015, et plus de 6.000 depuis début 2023 seulement.
Si l'armée et les VDP (volontaires) sont les principales cibles de ces violences, les civils paient également un lourd tribut et plus de 6.000 écoles sont fermées dans le pays, soit près d'une sur quatre, selon le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC).
Au bout d’un an, "force est de reconnaître que le problème qui a justifié l’irruption du capitaine Traoré sur la scène politique nationale est loin d’être réglé", analyse dans un éditorial le journal privé burkinabè l'Observateur Paalga.
"L'arrivée d'Ibrahim Traoré avait suscité un grand espoir auprès des populations face à la situation sécuritaire. Beaucoup d'efforts ont été entrepris sur le terrain pour reconquérir des localités, mais la situation s'est considérablement dégradée", abonde le spécialiste du Sahel, Lassina Diarra, cité par l'AFP.
La sécurité, préalable à la transition
Les soutiens du pouvoir militaire refusent de parler d’échec et soulignent l’amélioration de la logistique au sein de l’armée.
"Il n'y a pas d'échec. Nos soldats étaient sous-équipés pour la lutte contre le terrorisme mais avec l'arrivée du capitaine Traoré, on a acquis d'énormes moyens", tempère Lassané Sawadogo, coordonnateur du Front pour la défense de la patrie, un mouvement pro-régime.
Deux millions de personnes ont été déplacées à cause des violences depuis 2015, mais fin août le gouvernement avait revendiqué le retour de plus de 190.000 d'entre elles dans leurs localités respectives, vantant une reconquête de territoires jadis occupés par des groupes terroristes.
Mais est-ce suffisant pour envisager la fin du régime militaire et un retour à la légalité constitutionnelle au Burkina Faso ?
La transition doit théoriquement durer jusqu'en juillet 2024, avec un retour des civils au pouvoir via une élection présidentielle. Il faut noter cependant que 40 % du territoire est sous l’emprise des terroristes.
En mai, le Premier ministre Apollinaire Joachimson Kyélem de Tambèla avait affirmé qu'il ne pourrait y avoir d'élections sans le rétablissement de la sécurité.